“Offrir une seconde vie à des arbres fruitiers à l'abandon”
David Frendo, paysagiste à Saint-Tropez, a eu l'idée de remettre en état des poiriers de vergers délaissés de la vallée du Rhône, en vue de les replanter dans les jardins qu'il réalise. Des arbres vénérables qu'il proposera aussi désormais à d'autres entrepreneurs du paysage.
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David Frendo, paysagiste à Saint-Tropez, loue 3 hectares de verger, dans la vallée du Rhône, à Saint-Pierrede-Boeuf, entre Condrieu et Tournon. Mais, contrairement aux exploitants voisins, la récolte des fruits n'est pas sa finalité. Ces vergers étaient pour la plupart abandonnés. L'objectif est d'offrir une seconde vie aux arbres vénérables qui les constituent en les transplantant, dans un premier temps, dans des jardins ornementaux et des réalisations « maison » de l'entreprise, et, désormais, en les proposant à d'autres entreprises du paysage.
C'est en travaillant sur le projet de rénovation du jardin d'une propriété viticole bordelaise que l'idée a germé. Ce jardin historique, malmené par la tempête de 1999, était quasiment dépourvu de vieux arbres. Implanter des sujets adultes permettait de créer immédiatement une ambiance, et la proposition de réaliser deux allées de fruitiers pour mettre en valeur le jardin à l'Italienne a immédiatement séduit le client. Reste qu'il était difficile de trouver sur le marché de la pépinière des arbres fruitiers adultes, mais le paysagiste avait déjà une petite idée en tête. « En traversant la vallée du Rhône, j'avais remarqué que bon nombre de vergers étaient à l'abandon. À l'instar des oliviers en Espagne ou au Portugal, il m'a semblé possible de donner une seconde vie à ces arbres. J'ai recherché des espèces de faible vigueur, pouvant être maintenues facilement par la taille, comme le poirier. Je suis allé voir les propriétaires pour leur proposer de louer leurs parcelles et d'acheter les arbres. Plusieurs ont accepté la proposition. Ces arbres laissés sans entretien depuis plusieurs années pour certains étaient de toute façon condamnés à être arrachés », explique David Frendo. Aujourd'hui, l'entreprise Savoir Vert loue des vergers de poiriers, répartis en sept ou huit parcelles, ce qui représente environ mille arbres pour quatre variétés de poiriers : 'Packham's Triumph', 'Williams', 'Beurré Hardy' et 'Passe Crassane'.
Si, sur cette propriété de la région bordelaise, les poiriers ont été directement transplantés dans le jardin, désormais, tous les arbres acquis requièrent un travail de pépiniériste, afin d'obtenir des plantes de qualité optimale. « Le but est double », précise David Frendo. « D'une part, obtenir un système racinaire dense pour s'assurer des meilleures chances de reprise et, d'autre part, retravailler la partie aérienne pour lui donner une forme harmonieuse. »
Près d'un quart des arbres achetés ont d'emblée été éliminés, car trop chétifs, mal charpentés ou présentant un système racinaire insuffisant. Pour les trois quarts restants, plusieurs opérations sont menées régulièrement : cernage, avec ou sans soulèvement de la motte, pour briser les racines du dessous et provoquer le développement de chevelu, et contreplantation si les écarts entre les arbres ou entre les rangées sont insuffisants. Une rangée sur deux peut, par exemple, être transplantée, la rangée restante étant simplement cernée, ou bien tous les arbres peuvent être transplantés si ceux-ci sont trop serrés sur le rang. Pour assurer un meilleur développement des radicelles, les opérations de cernage et de contreplantation sont suivies d'une fumure organique (compost) et organominérale, une analyse de terre ayant révélé un fort déséquilibre en phosphore et potasse. Un arrosage par goutte-à-goutte en ligne ou, mieux, en cercle autour du tronc à l'aplomb des nouvelles racines, est installé. Enfin, un paillage sur le rang, à base de déchets verts, est installé et l'inter-rang est laissé en enherbement naturel. La partie aérienne subit quant à elle une taille plus ou moins forte selon l'état des poiriers. Les arbres avaient été formés en gobelet ou en espalier. Il s'agit de retrouver ces formes tout en réduisant le volume général et en évitant les rabattages trop sévères qui provoquent des plaies importantes.
« Cela fait quatre années que nous travaillons sur ces arbres. Aujourd'hui, nous maîtrisons les différentes opérations nécessaires à leur renaissance », poursuit David Frendo. « Le but étant, qu'au bout de deux à trois ans de culture, nous puissions proposer des arbres formés avec un taux de reprise proche de 100 % et pouvant montrer une forte vigueur dès la première année de plantation. Les soins pendant et après la plantation, notamment l'arrosage, sont essentiels, c'est pourquoi, en dehors de nos propres créations, nous réservons ces arbres aux professionnels du paysage. Ces formes fruitières permettent de structurer des jardins, cloisonner une scène, remplacer une haie, souligner une allée, mettre en valeur un potager... Nos clients sont généralement enthousiastes face à ce type de produit pour son originalité et sa qualité. Nous les proposons aussi dans nos jardins méditerranéens. Quand on fait des recherches, on s'aperçoit que le poirier est historiquement présent dans cette région, par exemple au Pradet où l'on trouve dans certains jardins des arbres avec des troncs de 30 à 40 cm de diamètre. Chacun est unique ! »
La location des terres et l'achat des arbres ne représentent pas un poste très élevé, et ce sont la main-d'oeuvre et le matérie qui absorbent l'essentiel de l'investissement. L'ensemble du personnel de l'entreprise, soit quatre à cinq personnes, se rend sur place environ cinq semaines chaque hiver pour les opérations de contreplantation, cernage, taille, paillage. Un salarié est présent du printemps à l'automne, une semaine sur deux, pour l'entretien (fauchage, binage...) et les traitements éventuels. La surveillance de l'arrosage est assurée tout au long de la saison de végétation par une personne extérieure à l'entreprise. Le prix de vente public, départ pépinière, oscille entre 600 et 1 200 € HT selon la forme de l'arbre et la quantité commandée. Le coût du transport par camion grue est fonction de la distance et de la quantité d'arbres livrés.
Claude Thiery
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